03/10/2018

Start up: cachez cette faillite que l'on ne saurait voir

par Allo Conso
 
Certains patrons de start up se gavent de subventions publiques et de l'argent des investisseurs avec des produits mal pensés ou sans étude de marché au préalable : c'est l'envers de la Start Up nation. En France, 90% des startups créées font faillite, malgré un environnement économique favorable. La faute, le plus souvent, à leurs dirigeants.
 

En mars 2018, Theranos, une start-up qui prétendait révolutionner les tests sanguins, tombe de son piédestal. Dans un acte d’accusation au vitriol, la Securities & Exchange Commission (SEC), le gendarme américain de la finance, décrit la « fraude élaborée » et les années de mensonges et de subterfuges qui ont permis à l’entreprise de « lever plus de 700 millions de dollars auprès d’investisseurs ».

Car depuis quinze ans, la CEO de Theranos Elizabeth Holmes ment au public et aux actionnaires en promettant l’ubérisation des tests sanguins grâce à la mise en place d’une technologie disruptive, peu chère et fiable. Au-delà de cette histoire trop belle pour être vraie (la jeune pousse avait pourtant été valorisée à 9 milliards de dollars), l’incident est symptomatique d’un écosystème parti en roue libre, dans lequel l’entrepreneur, véritable Néron des temps modernes, met le feu à son entreprise et évacue ses responsabilités derrière des grands discours marketing autour des « vertus de l’échec ». 

L’envers de la Start-up Nation

Les États-Unis ne sont pas les seuls à avoir été emportés par la vague start-up. Le milieu politique français, conquis par ce discours vantant l’entreprenariat, soutient massivement les créations d’entreprises. Non sans échecs.

Car selon une étude de l’INSEE parue en 2016, 90% des start-ups en France échouent. Ce taux d’échec record est d’autant plus marquant que les pouvoirs publics font tout pour soutenir la montée en puissance des start-ups. Entre déversement massif d’argent public et petits arrangements législatifs, la « Start-up Nation » fait tout pour favoriser l’entreprenariat agile.

Mais le plomb ne se transforme pas toujours en or. Nombreuses sont les jeunes pousses qui échouent. Les raisons sont nombreuses, mais dans la majorité des cas, 42% d’entre elles disparaissent parce qu’elles ne trouvent pas de marché. Dit autrement, en omettant le BA-BA d’une étude préalable et se fiant uniquement sur la certitude que leur produit rencontrera forcément des clients (ce que l’on appelle le « risque de projection affinitaire »), les dirigeants ont foncé droit dans le mur.

 Hubris patronal

Pourtant, même quand le marché est mûr et que le produit est solide, une jeune pousse peut échouer lamentablement dès lors qu’elle est laissée aux mains de dirigeants immoraux, inexpérimentés ou toxiques.

En France, les exemples pullulent.

Le cas le plus emblématique est certainement celui de Heetch, un service de transport entre particuliers fondés par Teddy Pellerin et Mathieu Jacob. Les deux hommes ont été lourdement condamnés pour leur vision très élastique du droit du travail. Le tribunal les accusera par ailleurs d’avoir entretenu la « précarisation » et « l’angoisse » des chauffeurs de taxis. Résultat : Heetch est KO debout et ses patrons ont frôlé de peu l’interdiction de diriger une entreprise. Avant, il est vrai, d’opérer un rebond assez spectaculaire quelques mois plus tard, en s’appuyant cette fois sur un board expérimenté.

Autre cas d’échec retentissant ? Celui de Permigo, une start-up lyonnaise créée par Grégory Giovanonne et Serge Haroutiounian qui est partie en redressement après seulement un an d’existence. Au-delà d’un modèle économique bringuebalant, c’est la surabondance de frais qui finira de plomber l’entreprise : achats de coûteux locaux dans le 16ème, recrutement d’une soixantaine de moniteurs salariés… le tout en moins d’un an d’existence. Bref, les dirigeants ont vu trop gros, et trop vite. Les principales victimes ? Les clients qui ont déboursé près de 800 euros qu’ils ne reverront jamais.

Heureusement, certaines entreprises ont su arrêter les frais à temps. C’est le cas de WiJet, une startup qui a révolutionné le voyage d’affaires… mais qui a bien failli mourir de ses dissensions internes. Comme pour Heetch, la présence d’un board sérieux a permis à Wijet de rebondir. Quant à Corentin Denoeud, il s’est reconverti depuis peu dans la blockchain.

 Passer du start-upper au chef d’entreprises

Mais alors, tout est-il à jeter dans le monde faussement idyllique de la start-up ? Pas exactement, nous expliquent les auteurs et sociologues Nicolas Menet et Benjamin Zimmer.

Dans leur livre « Start-up, arrêtons la mascarade » paru en février 2018, le duo distingue ainsi deux profils d’entrepreneurs : le start-upper et le chef d’entreprise. Le profil du premier est désormais bien connu : celui d’« un homme blanc, ingénieur, diplômé d’une grande école et câblé innovation ». Si ce dernier invente des modèles nouveaux, il est en revanche bien incapable de faire vivre une entreprise. C’est à ce moment-là que se pose la question : « Ou c’est l’exit et il [le startupper] part en laissant la place à un chef d’entreprise ou il devient lui-même un chef d’entreprise » explique ainsi Nicolas Menet pour la Tribune.

Mais le capitalisme ayant horreur du vide, et nombreux sont les patrons qui se sont inventés une nouvelle vie, sans jamais que cela remette en cause le mythe fondateur du Steve Jobs moderne. Des collectifs se créent pour défendre une « nouvelle vision » de l’entreprenariat, à l’image des « Rebondisseurs », ces patrons qui prétendent se remettre en selle après leur fiasco et dont Corentin Denoeud (encore lui !) est devenu l’illustration ambigüe. Le tout servi par un discours marketing rôdé, teinté d’américanisme bienveillant sur les vertus de l’échec.

Une drôle de façon de retourner les responsabilités…

Obike, la petite entreprise qui descend

Si vous habitez Paris et n’avez jamais entendu parler d’oBike, vous avez sûrement déjà vu ses deux roues curieux, gris et jaunes, qui encombrent les trottoirs de la capitale. Une douzaine d’entreprises de vélos partagés se disputent le marché, et comme le disait Alban Sayag, ex-PDG d’oBike : « Tous les opérateurs ne pourront pas survivre » … Lucide, le boss avait peut-être déjà anticipé sa chute.

 

Y’a-t-il un pilote chez oBike ?

 

oBike est une startup singapourienne qui a investi 38 millions d’euros pour envahir les capitales de la planète, de Melbourne à Rome en passant par Paris, où elle s’est installée en novembre 2017. Trente-huit millions pour un si grand marché, c’est peu, par conséquent les vélos mis à disposition sont particulièrement rudimentaires. L’équipe parisienne chargée de gérer la flotte est réduite à son minimum. Lors d’un reportage, réalisé par France Info en novembre 2017 dans les locaux parisiens d’Obike, on constate que, ce qu’Alban Sayag appelle « la tour de contrôle » n’est en réalité qu’une une petite salle où deux très jeunes personnes pianotent sur un ordinateur portable. Côté management, les choix posent aussi question. Alban Sayag, fondateur de l’application WINGiT, liquidée en mars 2018, est un habitué des faillites et des dépôts de bilan. Les fondateurs d’oBike ne se sont peut-être pas vraiment donnés les moyens de réussir. En juin 2018, après seulement quelques mois à la tête de de la flotte jaune et grise, le PDG a quitté l’entreprise. A-t-il jeté l’éponge ou les Singapouriens se sont-ils aperçus de leur erreur de casting ? Mystère.

 

La mauvaise idée…

 

Il est possible qu'Alban Sayag ne soit pas remplacé dans le cas où les fondateurs d’oBike aient décidé de se retirer de la capitale française où ils n’ont connu que des déboires. Le premier problème, et non le moindre, auquel la société a été confrontée est le manque de clients. A quoi sert d’entretenir une importante flotte de 500 vélos si vous n’avez pas d’utilisateurs ? Sur son compte Facebook, la compagnie revendique 128'000 abonnés mais obtient un ou deux « j’aime », pas plus, à chacune de ses publications, preuve du manque d’engagement. De plus, les deux roues encombrant les rues souvent inutilement. Gênant les piétons, ils ont souvent été vandalisés, mais pas volés, leur qualité laissant à désirer. Pour remédier à cette situation et entretenir le parc, Alban Sayag avait cependant eu une idée de génie : rémunérer les associations de cyclistes pour réaliser le travail que sa société était incapable de faire. Problème majeur, tout se paye et cette illumination réduisait les marges, déjà faibles, d’oBike de 50%. Enfin, devant le capharnaüm de toutes les flottes des douze compagnies qui se disputent le marché, la mairie de Paris avait envisagé de faire payer une taxe sur les vélos partagés. Bref, l’investissement dans la capitale, même à peu de frais, avait tout d'une fausse bonne idée.

 

Le Titanic

 

Alban Sayag, le capitaine du bateau, a quitté un navire en train de couler et fonce déjà vers de nouvelles aventures. Malgré ses multiples déboires, la plupart des sociétés qu’il a créées ont été liquidées. Il ne semble toutefois pas rencontrer de difficultés à se relancer. Il pourrait pour cela bénéficier de l’aide de son père, Roland Sayag, un entrepreneur touche à tout, des produits de beauté à l’immobilier... A quand le prochain naufrage ?

3 startups incontournables de 2018

WeMoms, l’application de référence pour les mamans

Lancée en 2014, la startup est devenue la 1ère communauté mobile de jeunes et futures mamans en France avec 400 000 utilisatrices et compte parmi ses investisseurs des géants de la tech dont Xavier Niel, Oliver Samwer (Rocket Internet), Jacques Veyrat (Impala) ou encore Jean-David Blanc (AlloCiné). Conception, grossesse, sommeil, alimentation, santé, vie perso… Pour chaque question, l’application permet de trouver un conseil en moins de 5 minutes, de jour comme de nuit.

Et elle a réussi à reproduire ce succès au Brésil, devenant n°1 en 3 mois alors qu’il lui en avait fallu 16 pour la France. Depuis le lancement en février 2017 et déjà 14,600 utilisateurs actifs chaque mois pour une croissance de 20% chaque mois.

 

Comet, la startup qui connecte les grandes entreprises avec les freelances tech et data les plus compétents

Fondée il y a tout juste un an, Comet est une plateforme qui connecte instantanément les meilleurs freelances tech et data aux entreprises les plus ambitieuses dans le cadre de leur transformation digitale. La start-up développe ses propres technologies : un programme sélectif d’évaluation pour s’assurer d’un haut niveau de compétences sur la plateforme et un algorithme de « matching » qui garantit de trouver le meilleur expert adapté à toutes les missions tech et data en seulement 48 heures.

La startup a déjà réalisé plus de 300 missions pour des clients comme Renault, Deezer, LVMH ou encore la Société Générale, en faisant appel à sa communauté forte de 1 500 développeurs freelances. Autre signe fort, elle vient de lever 2 millions d’euros pour se développer en Europe.

 

Knot, le vélib transformé en trottinette !

Knot est une solution de trottinettes en libre-service, gérée depuis une application mobile. Un moyen de déplacement dédié au dernier kilomètre, en ville, sur des campus universitaires ou des entreprises, entre une gare et un lieu de travail. Compacte et facile à utiliser, la trottinette est adaptée aux trajets multimodaux et aux trottoirs.

La problématique du dernier kilomètre est devenue primordiale pour les villes. La trottinette semble être le mode de déplacement le plus cohérent avec les enjeux multimodaux des déplacements actuels (train, métro, bus pour un seul trajet…).